Les employeurs de l’Ontario sont nombreux à se demander ce qu’il adviendra de la Loi de 2018 sur la transparence salariale à la suite de la décision de leur nouveau gouvernement d’aller de l’avant avec l’annulation de certaines réformes clés qui avaient été proposées dans le projet de loi 148.

La Loi de 2018 sur la transparence salariale a été adoptée peu de temps avant les élections provinciales de 2018 par le gouvernement libéral ontarien, qui a dû céder sa place au gouvernement progressiste‑conservateur nouvellement élu. En plus d’instaurer un certain nombre de règles visant à encadrer la manière dont les employeurs recrutent leurs employés, cette loi exigera, à compter de 2020, que les grands employeurs ontariens recueillent les renseignements prescrits en matière de rémunération et établissent, à l’intention du ministère du Travail, des rapports appelés « rapports sur la transparence salariale », qui présenteront cette information selon le genre, et éventuellement d’autres caractéristiques démographiques.

Le texte de loi en dit cependant très peu sur les types de renseignements qui devront figurer dans les rapports des employeurs à l’intention du gouvernement, de même que sur les caractéristiques visées en plus du genre et les moyens qui seront employés pour faire appliquer la Loi, le gouvernement ayant choisi de procéder par règlements pour tous les aspects clés de ces nouvelles dispositions. Ces règlements n’ont toujours pas été publiés, alors que la Loi entrera en vigueur dans seulement deux mois, soit le 1er janvier 2019.

Le nouveau gouvernement n’a manifesté aucune intention d’abroger ou de modifier la Loi de 2018 sur la transparence salariale avant son entrée en vigueur, contrairement au projet de loi 148. Il pourrait toutefois reporter son application au lieu de l’abroger complètement, comme il a été rapporté dans les médias. Il serait souhaitable que le gouvernement jette un peu de lumière sur le champ d’application qu’il entend donner aux règlements pris en vertu de la Loi.

Que peuvent faire les employeurs entre-temps?

Pour l’heure, les employeurs ontariens ne peuvent pas faire grand‑chose pour se préparer à devoir remettre des rapports sur la transparence salariale. En l’absence de tout règlement, même à l’état d’ébauche, toute tentative pour prédire les types de renseignements que devra recueillir un employeur et les rapports qu’il devra établir se réduirait à de pures conjectures. Il en va de même pour la collecte des données sous‑jacentes, puisqu’il est tout à fait possible que d’autres caractéristiques personnelles, outre le genre, doivent faire l’objet d’un suivi. Quoi qu’il en soit, il serait prudent de la part des employeurs ontariens de commencer à se préparer à certaines exigences qui doivent, si les choses demeurent ainsi, entrer en vigueur le 1er janvier 2019.

Les exigences suivantes doivent entrer en vigueur le 1er janvier 2019 :

  1. Il est interdit à l’employeur de demander des renseignements sur l’historique de rémunération d’un candidat, que ce soit personnellement ou par un moyen indirect.
  2. L’employeur qui fait une annonce publique de poste doit inclure dans l’annonce « des renseignements sur la rémunération ou fourchette de rémunération prévue pour le poste ».
  3. Un employeur ne peut user de représailles à l’endroit d’un employé au motif que celui‑ci :
    1. s’est informé auprès de l’employeur au sujet de sa rémunération;
    2. a divulgué sa rémunération à un autre employé;
    3. s’est informé au sujet d’un rapport sur la transparence salariale présenté au ministère du Travail (cette disposition n’aura lieu d’être que lorsque de tels rapports seront exigés);
    4. a donné au ministère du Travail des renseignements indiquant si l’employeur se conforme ou non aux exigences de la Loi;
    5. a demandé à l’employeur de se conformer à la Loi.

Il serait avisé pour les employeurs ontariens de jouer de prudence et de partir du principe que ces règles entreront en vigueur le 1er janvier 2019. S’il s’avérait plus tard que ce n’est pas le cas, ils seront au moins dans une meilleure position pour respecter toute échéance éventuelle.

Quelles politiques ou pratiques un employeur pourrait‑il devoir changer?

Quelques règles et pratiques courantes en milieu de travail pourraient entrer en conflit avec la Loi dans sa version actuelle.

Les règles interdisant aux employés de discuter de rémunération pourraient enfreindre la Loi (du moins si la règle est assortie d’une sanction, auquel cas elle pourrait être considérée comme une forme de représailles). Il se peut en effet qu’une règle interdisant les discussions sur la rémunération soit énoncée à différents endroits dans un milieu de travail, notamment dans un manuel, un contrat d’emploi et d’autres politiques d’emploi. Il pourrait être bon pour les employeurs ontariens de vérifier s’ils ont inclus une telle règle dans leurs documents et, le cas échéant, d’envisager de la retirer en vue de l’entrée en vigueur de la Loi.

Les responsables de l’embauche et les recruteurs auraient peut-être avantage à se tourner vers d’autres moyens d’évaluer la rémunération à offrir à un candidat au lieu de s’enquérir de l’historique de rémunération. En effet, compte tenu de l’obligation de divulguer la rémunération prévue ou une fourchette de rémunération pour le poste dans une annonce publique, il serait sans doute préférable pour les employeurs qui auraient sans cela attendu d’avoir choisi un candidat pour déterminer l’enveloppe de rémunération associée à un poste de se pencher sur la question bien avant de procéder aux entrevues.

Dans un même ordre d’idées, les employeurs qui n’ont recours à aucun régime ni à aucune structure ou échelle de rémunération pourraient devoir se doter d’un régime de rémunération plus formel afin qu’il leur soit plus facile de se conformer à la Loi.

Aucune précision n’a encore été donnée sur ce que suppose l’exigence de la Loi voulant que les employeurs qui font une annonce publique de poste incluent dans l’annonce « des renseignements sur la rémunération ou fourchette de rémunération prévue pour le poste ». Rares sont les employeurs du secteur privé qui publient la rémunération prévue pour un poste (alors qu’il s’agit d’une pratique plus répandue chez les employeurs du secteur public). Il pourrait être avisé de la part des employeurs du secteur privé de suivre l’exemple de leurs homologues du secteur public une fois la Loi en vigueur.

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