De nombreux changements au droit du travail et de l’emploi ont récemment été adoptés dans plusieurs provinces canadiennes. Voici un survol des principaux changements apportés aux lois provinciales de l’Ontario, de l’Alberta, de la Colombie‑Britannique et du Québec qui auront des répercussions sur les milieux de travail syndiqués et non syndiqués. Tous les changements recensés sont entrés en vigueur le 1er janvier 2019, à l’exception des modifications apportées à la Loi de 1995 sur les relations de travail de l’Ontario, qui sont entrées en vigueur le 21 novembre 2018.

Ontario

Les changements s’appliquent à tous les milieux de travail

Gel du salaire minimum Le salaire minimum demeurera à 14 $ l’heure, la majoration à 15 $ l’heure qui devait entrer en vigueur le 1er janvier 2019 ayant été annulée. Les augmentations subséquentes prévues à compter de 2020 suivront l’inflation.
Salaire pour jour férié Le salaire pour jour férié sera calculé à partir du salaire normal total gagné par l’employé et l’indemnité de vacances qui lui est payable au cours des quatre semaines de travail qui ont précédé le jour férié, divisés par 20.
Dispositions relatives à l’horaire de travail Les dispositions suivantes relatives à l’horaire de travail, qui devaient entrer en vigueur en vertu du projet de loi 148, ont été abrogées :

  • Le droit de l’employé de demander une modification de son horaire de travail ou de son lieu de travail.
  • L’obligation de payer trois heures de travail aux employés sur appel qui sont disponibles, mais ne sont pas convoqués au travail.
  • Le droit de refuser de travailler un jour où l’employé ne devait pas travailler si le préavis est de moins de 96 heures.
  • L’obligation de payer trois heures de travail lorsque le quart de travail est annulé dans les 48 heures précédant l’heure de début du quart de travail.

La règle suivante relative à la modification de l’horaire de travail est entrée en vigueur le 1er janvier 2019 : l’employeur verse un salaire correspondant à trois heures de travail à l’employé qui travaille normalement plus de trois heures par jour et qui est tenu de se présenter au travail, mais travaille moins de trois heures alors qu’il était disponible pour travailler plus longtemps.

Le salaire auquel il a droit correspond au montant le plus élevé entre ces deux montants :

  • le salaire correspondant au taux horaire normal de l’employé pour trois heures de travail;
  • la somme du montant gagné par l’employé pour la période travaillée, à laquelle vient s’additionner le salaire correspondant au taux horaire normal de l’employé pour le reste de la période de trois heures.

La règle ne s’appliquera pas si l’employeur est incapable de fournir du travail pour une raison indépendante de sa volonté, comme un incendie, la foudre, une panne de courant, de mauvaises conditions météorologiques ou d’autres circonstances similaires entraînant une interruption de travail.

Congés L’obligation d’accorder aux employés dix jours de congé d’urgence personnelle a été éliminée. À compter du 1er janvier 2019, les employés recevront au total huit jours de congé sans solde, répartis ainsi :

  • trois jours par année pour des raisons personnelles d’ordre médical;
  • trois jours par année pour des responsabilités familiales (maladie ou autre urgence concernant un conjoint ou un enfant);
  • deux jours par année pour cause de décès.

Les employeurs ont de nouveau le droit d’exiger un certificat délivré par un médecin à titre de preuve que l’employé a le droit de prendre un congé de maladie.

Un congé similaire pris aux ternes d’un contrat d’emploi serait réputé être un congé aux termes de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi (LNE).

À travail égal, salaire égal L’obligation de verser un salaire égal pour un travail égal en fonction de la situation d’emploi (c.-à-d. emploi à temps partiel ou occasionnel) a été annulée.

Il demeure interdit de verser un salaire inégal pour un travail équivalent en raison du sexe.

Classification des employés En cas de litige sur la question de savoir si un travailleur a le statut d’employé ou d’entrepreneur indépendant, l’employeur n’a plus à prouver que la personne n’a pas le statut d’employé (l’« inversion du fardeau de la preuve » prévue dans le projet de loi 148 a été éliminée). L’interdiction générale de procéder à une classification erronée des employés demeure.
Loi de 2018 sur la transparence salariale La Loi de 2018 sur la transparence salariale a été mise en suspens pour une période indéterminée dans l’attente d’une analyse approfondie.
Régime de pensions du Canada Taux de cotisation :

·         De 2019 à 2023, le taux de cotisation pour les employés touchant un salaire annuel s’établissant entre 3 500 $ et la limite de gains initiale augmentera progressivement d’un point de pourcentage (de 4,95 % à 5,95 %). Les cotisations de l’employeur augmenteront également, au même titre que celles des employés.

·         En 2019, le taux de cotisation est de 5,1 % des revenus admissibles (revenus jusqu’à concurrence de 57 400 $). En 2020, le taux de cotisation s’établira à 5,25 %.

Changements applicables aux milieux de travail syndiqués

Les changements dans cette section sont entrés en vigueur le 21 novembre 2018 (date à laquelle le projet de loi 47, Loi de 2018 pour un Ontario ouvert aux affaires, a reçu la sanction royale).

Listes des employés La disposition autorisant un syndicat à demander une liste des employés avec leurs coordonnées s’il est en mesure de démontrer qu’il a le soutien de 20 % des employés de l’unité de négociation est abrogée.
Accréditation corrective Les dispositions obligeant la Commission des relations de travail de l’Ontario (CRTO) à ordonner l’accréditation corrective si elle conclut que l’employeur a contrevenu à la Loi de 1995 sur les relations de travail de l’Ontario et que cette infraction a empêché le syndicat de prouver une adhésion syndicale de 40 % ont été abrogées, et la CRTO sera de nouveau investie du pouvoir discrétionnaire de choisir entre accréditer le syndicat ou ordonner un nouveau scrutin.
Arbitrage de la première convention collective Les dispositions autorisant la médiation pour une première convention collective ou la médiation-arbitrage en toute circonstance ont été abrogées. La CRTO ordonnera le règlement de la première convention collective par voie d’arbitrage sur présentation d’une requête et réception de motifs raisonnables justifiant le défaut des parties de faire des efforts raisonnables en vue de s’entendre.
Autre processus d’accréditation des syndicats Les dispositions prévoyant un autre processus d’accréditation des syndicats dans l’industrie des services de gestion d’immeubles, l’industrie des services de soins à domicile et des services communautaires et l’industrie des agences de placement temporaire sont abrogées.
Révision des unités de négociation La CRTO ne peut plus réviser la structure des unités de négociation nouvellement accréditées avant la conclusion d’une convention collective.

La CRTO peut revoir la structure d’une unité de négociation uniquement sur présentation d’une demande pour une telle révision et si elle est convaincue que l’unité de négociation en place ne convient plus pour mener une négociation collective.

Réintégration de l’employé après une grève La réintégration d’un employé après une grève n’est possible que si le syndicat en fait la demande dans les six mois suivant le début de la grève.
Communications et avis Dans les instances qui relèvent de la Loi, les avis et communications seront envoyés par la poste, par messagerie, par télécopie, par courrier électronique ou par tout autre mode prescrit.
Amendes maximales Les amendes maximales pour une infraction à la Loi ont été rétablies aux montants qui étaient en vigueur avant le projet de loi, soit :

·         2 000 $ pour les personnes physiques;

·         25 000 $ pour les personnes morales.

Alberta

Semaine de travail comprimée Un employeur ne peut plus offrir à ses employés des semaines de travail comprimées, qui permettaient de travailler moins de journées dans la semaine, mais plus de huit heures par jour sans que ces heures additionnelles soient réputées être des heures supplémentaires.

Les dispositions relatives à la semaine de travail comprimée qui étaient entrées en vigueur le 1er janvier 2018 sont devenues caduques le 1er janvier 2019.

Les dispositions relatives à la semaine de travail comprimée mises en place en vertu d’une convention collective continueront de s’appliquer jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle convention collective.

Désormais, les employeurs doivent obtenir le consentement des employés pour conclure une entente de calcul de la moyenne des heures de travail. En vertu de ce type d’entente, un employeur peut établir des horaires de travail qui prévoient des journées de travail plus longues sans devoir rémunérer ses employés au tarif des heures supplémentaires en calculant la moyenne des heures de travail d’un employé sur une période de quelques semaines. Les journées de travail inscrites à l’horaire ne peuvent dépasser 12 heures.

Il existe deux types d’ententes de calcul de la moyenne des heures de travail :

  • Entente de calcul de la moyenne des heures de travail (qui s’applique aux groupes d’employés comme aux employés individuels) : durée maximale de 12 semaines
  • Entente relative à l’horaire de travail flexible selon le calcul de la moyenne des heures de travail (qui ne s’applique qu’aux employés individuels) : durée maximale de deux semaines

Toute prolongation de l’entente de calcul de la moyenne des heures de travail au-delà de la durée maximale de 12 semaines requiert une dérogation du directeur des normes du travail.

La période utilisée pour le calcul de la moyenne dans le cadre d’une entente relative à l’horaire de travail flexible selon le calcul de la moyenne des heures de travail ne peut être prolongée.

Les heures supplémentaires sont calculées en prenant le nombre d’heures travaillées excédant ce qui suit, selon le nombre le plus élevé entre les deux :

·         huit heures par jour (si l’horaire prévoit des quarts de travail de moins de huit heures) ou les heures de travail quotidiennes inscrites à l’horaire (si l’horaire prévoit des quarts d’au moins huit heures);

·         44 heures par semaine (sur une période de calcul de la moyenne d’une semaine) ou une moyenne de 44 heures par semaine (sur une période de calcul de la moyenne de plusieurs semaines).

Colombie‑Britannique

Impôt-santé des employeurs Un nouvel impôt sur la masse salariale est entré en vigueur. Il vise à remplacer les cotisations au régime provincial de services médicaux, appelé à disparaître graduellement. L’impôt s’appliquera aux employeurs dont la masse salariale dépasse 500 000 $, le pourcentage de l’impôt prélevé sur la masse salariale augmentant pour chaque tranche de revenus de 250 000 $ au‑delà du seuil de 500 000 $.

En 2018, le gouvernement de la Colombie‑Britannique prévoyait apporter des changements importants au Labour Relations Code et à l’Employment Standards Act en 2019. Un comité a recommandé quelques modifications, et le gouvernement devrait présenter de nouveaux projets de loi tenant compte de certaines de ces recommandations au début de 2019.

Québec

Congés annuels payés Les travailleurs ont droit à un congé annuel payé de trois semaines après trois ans de service chez le même employeur, au lieu de cinq ans.
Harcèlement psychologique Tous les employeurs sont tenus de mettre en place une politique de prévention du harcèlement psychologique (qui englobe le harcèlement sexuel) et de traitement des plaintes.

Le délai de prescription pour le dépôt d’une plainte de harcèlement a été prolongé à deux ans.

Absences Les deux premiers jours d’une absence pour raisons familiales ou pour cause de décès, de congé de paternité, de maladie, de don d’organe, d’accident ou de violence conjugale seront payés.

La violence conjugale a été ajoutée à la liste des raisons pour lesquelles un employé peut s’absenter sans solde du travail pendant une période d’au plus 26 semaines.

Droit de refuser de travailler L’employé a désormais le droit de refuser de travailler pour plus de deux heures (au lieu de quatre) au‑delà de ses heures habituelles par période de 24 heures.
Équité salariale et statut d’emploi Un employeur ne peut accorder à un salarié un taux de salaire inférieur à celui consenti à ses autres salariés qui effectuent les mêmes tâches, uniquement en raison de son statut d’emploi.

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