Le gouvernement de l’Ontario poursuit sans relâche ses démarches en vue de faire adopter d’importants changements au cadre législatif du travail et de l’emploi de la province. Le gouvernement a déposé le projet de loi 148 (Loi de 2017 pour l’équité en milieu de travail et de meilleurs emplois) en juin 2017, et lui a rapidement fait franchir l’étape de la première lecture avant de le renvoyer à un comité législatif appelé Comité permanent des finances et des affaires économiques pour qu’il l’examine plus en profondeur et qu’il propose d’éventuels amendements.

Le gouvernement a beaucoup tablé sur les consultations publiques menées par le Comité tout au long de l’été. Lors de ces consultations, le Comité a sollicité les commentaires des intervenants de l’industrie et du public sur le projet de loi 148 et les changements proposés. De nombreux défenseurs des employeurs espéraient sans doute que les consultations aboutiraient à des modifications à cette loi favorable aux employés afin d’assouplir certaines des dispositions les plus radicales ou à l’introduction de nouvelles dispositions qui favoriseraient les employeurs.

Malheureusement, les espoirs des employeurs à cet égard semblent avoir été déçus si l’on en croit la réponse initiale du Comité aux consultations publiques. Le Comité s’est réuni au cours de la semaine du 21 août 2017 pour discuter du projet de loi 148 et l’amender, et probablement pour établir la version qui sera présentée en deuxième lecture en septembre 2017, lorsque l’Assemblée législative provinciale reprendra ses travaux. Les amendements proposés n’ont apporté que peu ou pas de réponse aux plus grandes préoccupations des employeurs et, dans certains cas, ont fait exactement le contraire. Le Comité ne s’est pas penché sur des questions comme les augmentations rapides du salaire minimum, les jours payés obligatoires pour les congés d’urgence, les restrictions sur le recours des employeurs aux agences de placement temporaire et l’introduction de l’accréditation syndicale fondée sur les cartes d’adhésion dans de nouveaux secteurs de travail, et aucune des principales suggestions faites par les employeurs ou les organisations patronales n’a été retenue.

Principaux amendements

Le comité a effectivement adopté plusieurs des amendements proposés au projet de loi 148, dont la plupart élargissent et augmentent les avantages que les employeurs sont tenus d’accorder aux employés. En voici quelques-uns :

  • Augmentation du nombre maximal de semaines de congé parental jusqu’à concurrence de 26 semaines, ce qui ajoute jusqu’à six semaines supplémentaires de congé après une fausse couche.
  • Introduction d’un nouveau congé sans solde distinct pour les employés qui subissent (ou dont les enfants subissent) de la violence familiale ou sexuelle ou de la menace de violence sexuelle ou familiale.
  • Exigences accrues en matière de tenue de dossiers pour les employeurs et les agences de placement temporaire en ce qui concerne des questions comme les jours fériés, les congés, les périodes de vacances et l’indemnité de vacances.
  • Exigences accrues en matière de tenue de dossiers pour les employeurs et les agences de placement temporaire en ce qui concerne les dispositions relatives à l’annulation des quarts de travail prévus à l’horaire et des quarts de travail sur appel dans la version originale du projet de loi 148.
  • Obligation pour les employeurs de fournir une estimation du nombre d’employés de l’unité de négociation proposée au moyen d’une déclaration solennelle dans une demande d’accréditation syndicale.

Le Comité a également adopté un certain nombre de mesures que l’on pourrait qualifier de neutres à l’égard de l’employeur et qui apportent surtout des éclaircissements sur certaines des mesures précédemment adoptées. En voici quelques exemples :

  • Préciser que l’exclusion prévue par la Loi de 2000 sur les normes d’emploi pour certaines personnes effectuant un travail dans les collèges publics et les universités s’applique également aux personnes effectuant un travail semblable dans les collèges privés d’enseignement professionnel.
  • Préciser les modalités des obligations des employeurs selon les nouvelles dispositions relatives à l’annulation des quarts de travail prévus à l’horaire et des quarts de travail sur appel.
  • Établir un cadre de transition pour les exigences accrues en matière de tenue de dossiers.
  • Définir plus clairement le terme « échelle d’ancienneté » pour l’application des dispositions du projet de loi 148 sur l’équité salariale.
  • Exiger que les employeurs et les syndicats prennent des mesures raisonnables pour protéger la confidentialité des renseignements sur les employés lorsqu’un employeur est tenu de fournir à un syndicat une liste d’employés dans le cadre d’une campagne de recrutement.

Le Comité a également adopté plusieurs amendements proposés à la Loi de 1995 sur les relations de travail, qui ne faisaient pas auparavant partie du mandat relatif au projet de loi 148. On ne sait pas avec certitude si les militants syndicaux ou patronaux s’étaient déjà prononcés en faveur de ces mesures.

Par exemple, le Comité a adopté un amendement qui ferait passer de 20 à 45 jours l’interdiction de prendre des mesures de grève à la suite de la nomination d’un premier médiateur contractuel. Une autre modification prévoit que les parties engagées dans la négociation d’une première convention collective ont le droit de demander du soutien pédagogique en matière de relations de travail et de négociation collective. Le Comité a également supprimé une disposition prévoyant qu’un premier médiateur de la convention collective a tous les pouvoirs d’une commission de conciliation, ce qui a pour effet de limiter les pouvoirs de ces médiateurs.

Enfin, le Comité a effectué quelques modifications mineures que les employeurs trouveront peut‑être utiles :

  • Rétablissement du droit des employés de substituer un jour de congé à un jour férié où ils travaillent;
  • Légère limitation des nouvelles obligations pour les employeurs en matière d’établissement des horaires.

o Par exemple, les employeurs ne seront pas tenus de payer le minimum de trois heures en cas d’annulation d’un quart de travail prévu à l’horaire ou d’un quart de travail sur appel lorsque le travail de l’employé dépend des conditions météorologiques et que l’employeur ne peut fournir du travail pour des raisons météorologiques.

o De même, les employés ne seront pas admissibles à une indemnité minimale de trois heures pour les quarts de travail sur appel lorsqu’ils n’étaient pas disponibles pour travailler trois heures le jour en question.

o Les employés n’ont pas le droit de refuser les demandes de travail présentées dans les 96 heures précédant le début du quart de travail lorsque le travail consiste à s’occuper d’une situation d’urgence, à éliminer ou à réduire un danger pour la sécurité publique ou pour d’autres raisons prescrites.

o Limitation de l’admissibilité à un nouveau congé d’urgence payé en exigeant que l’employé ait travaillé pour un employeur pendant au moins une semaine avant d’avoir droit à des jours de congé payé (tout en conservant le droit à un congé non payé pendant cette première semaine).

Le point positif le plus important du point de vue de l’employeur a probablement été le rejet des propositions extrêmes du seul représentant du Nouveau Parti démocratique au sein du Comité. Ces propositions allaient de l’application universelle de l’accréditation par carte d’adhésion à l’augmentation des congés payés et de la durée minimale des vacances, en passant par une application plus large des dispositions sur l’équité salariale.

D’autre part, le Comité a également rejeté la seule proposition faite par les membres progressistes-conservateurs du Comité, qui aurait probablement reçu un large appui de la part des employeurs. Cette proposition aurait obligé le gouvernement à s’engager à mandater un analyste financier indépendant pour effectuer une analyse des répercussions économiques du projet de loi 148 et de ses effets. Étant donné les nombreuses critiques et préoccupations suscitées par le projet de loi 148 dans de nombreux milieux, les avantages d’une telle proposition, sont évidents même si plusieurs pourraient soutenir qu’il est trop tard pour une telle mesure.

Points saillants

Le projet de loi 148 amendé passe maintenant à l’étape de la deuxième lecture pour un examen plus approfondi. Bien que le gouvernement semble très pressé de l’adopter, il est encore possible que les employeurs se fassent entendre et que d’autres amendements soient apportés.

Étant donné l’avancement du projet de loi, les employeurs voudront peut-être prendre les mesures suivantes :

  • saisir toutes les occasions qui leur sont offertes de faire valoir leur point de vue;
  • revoir les principales dispositions du projet de loi 148 et évaluer dans quelle mesure ils sont prêts à s’adapter à ces dispositions si la loi est adoptée comme on prévoit qu’elle le sera;
  • examiner les amendements récents apportés au projet de loi et déterminer dans quelle mesure ils peuvent influer sur les préparatifs qui doivent être faits.

Pour aller plus loin

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