Les employeurs canadiens assujettis à la réglementation fédérale ont intérêt à prendre connaissance des changements au Code canadien du travail qui sont entrés en vigueur le 1er septembre 2019. Ces changements s’appliquent à de nombreuses normes minimales d’emploi concernant notamment les congés annuels, les pauses, les congés et l’établissement d’horaires prévisibles. Étant donné leur ampleur, ces changements ont des répercussions importantes sur les milieux de travail sous réglementation fédérale.
Soulignons que les changements entrent en vigueur à un moment particulier, soit à la veille d’une élection fédérale et tard dans l’année. À cet égard, de nombreux employeurs s’interrogent quant aux conséquences des changements sur les droits annuels, étant donné qu’il reste encore un tiers à l’année après le 1er septembre 2019. Le présent article expose les principaux changements au Code qui concernent les employeurs sous réglementation fédérale.
Heures de travail et établissement d’horaires prévisibles
Horaire de travail : Il est maintenant obligatoire de remettre aux employés un préavis écrit de 96 heures de leur horaire de travail, sous réserve de certaines exceptions et d’autres délais prévus dans des conventions collectives.
Modification à un quart de travail : Il est maintenant obligatoire de remettre un préavis écrit de 24 heures en cas de modification à un quart de travail. Ces changements pourraient poser problème aux employeurs qui ont besoin de flexibilité pour gérer les calendriers de production ou les fluctuations de la demande.
Heures supplémentaires : Les employés peuvent maintenant conclure un accord avec leur employeur en vue d’obtenir un congé payé à raison d’au moins 1,5 heure par heure supplémentaire effectuée. Ils auront également le droit de refuser des heures supplémentaires au motif qu’ils doivent s’acquitter de certaines responsabilités personnelles. (Même si ce changement cause une certaine inquiétude chez certains employeurs, il pourrait se révéler bénin une fois que les autorités fédérales auront clarifié la définition de « certaines responsabilités personnelles ».)
Périodes de repos : De nouvelles dispositions rendent obligatoires des pauses de 30 minutes non rémunérées. Deviennent également obligatoires des périodes de repos d’au moins huit heures entre les périodes ou les quarts de travail, sous réserve de certaines exceptions en cas d’urgence.
Conditions de travail souples
Demande de changement : Après six mois de travail, les employés ont désormais le droit de demander par écrit des changements à leurs heures de travail, leur horaire, leur lieu de travail et d’autres modalités et conditions qui restent à déterminer. L’employeur a 30 jours pour répondre par écrit aux demandes de conditions de travail souples. L’employeur peut accéder à la demande en tout ou en partie, ou encore la refuser pour les motifs suivants :
- les frais supplémentaires découlant des modifications représenteraient un fardeau pour l’employeur;
- les modifications auraient une incidence négative sur la qualité du travail;
- l’employeur ne peut réorganiser le travail entre les autres employés;
- l’insuffisance de travail pour l’employé qui fait la demande.
Congés
Périodes de service requises : Il n’est plus nécessaire de compter six mois de service ininterrompu pour avoir droit aux congés de maternité, parental, en cas de maladie grave et en cas de décès ou de disparition d’un enfant.
Congé pour violence familiale : Un employé qui est victime de violence familiale ou le parent d’une victime de violence familiale pourra bientôt prendre dix jours de congé par année. Si l’employé compte au moins trois mois de service ininterrompu, les cinq premiers jours du congé lui seront payés.
Congé de décès : Les employés ont maintenant droit à cinq jours de congé (les trois premiers étant payés pour les employés qui comptent trois mois de service consécutifs) advenant le décès d’un membre de leur famille immédiate.
Congé personnel : Les employés ont maintenant droit à un nouveau congé personnel, qui consiste en cinq jours par année civile, dont trois payés. L’employeur peut demander des documents à l’appui au plus tard 15 jours après le retour au travail de l’employé, lequel est tenu de les remettre s’il lui est raisonnablement possible de le faire. Ce congé peut être pris pour :
- soigner une maladie ou une blessure (en plus du congé pour raison médicale);
- s’acquitter d’obligations relatives à la santé d’un membre de la famille ou aux soins à lui fournir;
- s’acquitter d’obligations relatives à l’éducation d’un membre de la famille qui est âgé de moins de 18 ans;
- gérer toute situation urgente concernant l’employé ou un membre de sa famille;
- assister à la cérémonie de la citoyenneté sous le régime de la Loi sur la citoyenneté;
- d’autres raisons prévues par règlement.
Congés annuels
Périodes et interruption : Depuis l’entrée en vigueur des changements, les employés peuvent prendre leurs congés sur plus d’une période, moyennant l’autorisation de leur employeur. Ils peuvent également interrompre ou reporter leurs congés pour prendre un congé personnel ou un congé pour raison médicale.
Droits à congé annuel : Les employeurs doivent également savoir que les droits à congé annuel ont été revus à la hausse :
- Une année de service – deux semaines et indemnité de congé annuel de 4 % (inchangé)
- Cinq années de service – trois semaines et indemnité de congé annuel de 6 % (actuellement après six ans)
- Dix années de service – quatre semaines et indemnité de congé annuel de 8 % (nouveau)
Indemnité de jour férié : La période minimale de 30 jours de service pour avoir droit à l’indemnité de jour férié est abolie. De plus, l’indemnité de jour férié équivaut maintenant à au moins 1/20 du salaire de l’employé (heures supplémentaires exclues) pour la période de quatre semaines précédant immédiatement la semaine du jour férié.
Substitution d’un jour férié : Les employeurs peuvent remplacer un jour férié par n’importe quel jour, à condition d’obtenir l’approbation écrite de l’employé concerné. Lorsque la substitution touche plus d’un employé, elle doit être approuvée par 70 % des employés concernés ou par leur syndicat.
Continuité de l’emploi
Continuité présumée de l’emploi : À la suite de modifications au Code, la continuité de l’emploi est réputée pour les employés d’entreprises fédérales. Les dispositions en la matière s’appliquent maintenant aux transferts d’employés d’un employeur sous réglementation provinciale à un employeur sous réglementation fédérale. Elles s’appliquent aussi aux cessions de contrat par nouvel appel d’offres, au terme duquel un second employeur fournit des services dans le cadre d’un projet fédéral exécuté par un premier employeur.
Adaptation aux changements après le 1er septembre 2019 : à quoi les employeurs doivent-ils s’attendre?
Les employeurs pourraient devoir modifier leurs politiques et procédures en fonction des changements concernant les congés personnels et les congés annuels.
Congés personnels : Les autorités fédérales estiment que les employés auront droit à tous leurs congés personnels pour le reste de l’année civile 2019. Cela signifie qu’un employé pourra prendre cinq jours de congé personnel (dont trois payés) entre le 1er septembre et le 31 décembre 2019, et ce, sans égard au fait que huit mois de l’année se sont déjà écoulés. Il pourrait s’agir d’un coût imprévu pour les employeurs, pour qui les nouveaux maximums annuels nécessitent de faire le suivi de nouveaux types de congés et de congés payés. Cela dit, les employeurs pourraient être en mesure de faire valoir leur politique sur les congés de maladie ou les congés personnels déjà en vigueur pour éviter le cumul des congés nouveaux et actuels.
Congés annuels : Selon les autorités fédérales, les employeurs doivent appliquer les nouveaux taux d’indemnité de congés annuels liés au nombre d’années de service à tous les gains admissibles à partir du 1er septembre 2019. Par exemple, le taux minimum pour un employé comptant plus de dix années de service est de 8 % pour l’année de référence qui comprend le 1er septembre 2019.
Peu d’information a été transmise concernant le nombre de jours de congé, et de nombreux employeurs se demandent si les employés admissibles auront droit à une semaine de congé supplémentaire pour l’année de référence en cours. Nous gardons ce dossier à l’œil.
Conclusions
Les autorités fédérales devraient bientôt mettre à jour toutes les publications touchées par ces changements importants. Des documents d’orientation et d’interprétation devraient également être publiés pour que les employeurs sous réglementation fédérale aient suffisamment de temps pour modifier leurs politiques et procédures en conséquence.
Ogletree Deakins surveillera les nouveaux changements apportés au Code canadien du travail et fournira des renseignements sur leur mise en œuvre.
Stephen Shore est associé au bureau de Toronto d’Ogletree Deakins.
Jordan Romano a obtenu en 2019 un diplôme de la faculté de droit de l’Université Western Ontario et est actuellement stagiaire en attendant son admission au Barreau de l’Ontario.