Les lois régissant les lieux de travail en Ontario ont subi des changements majeurs au cours de la dernière année.

Premièrement, le projet de loi 148, adopté avant les élections provinciales par le gouvernement libéral de l’époque, prévoyait des augmentations importantes du salaire minimum, des congés d’urgence personnelle payés, des vacances et des protections en matière d’équité salariale fondées sur la situation d’emploi. En matière de relations de travail, le projet de loi 148 prévoyait un nouveau système d’accréditation par carte dans certaines industries, ainsi que des changements à l’accréditation corrective, à l’arbitrage des premières conventions et aux droits du successeur. Il n’est donc pas surprenant que de nombreux employeurs se soient dits préoccupés par la portée trop large et la mise en œuvre trop rapide de ces changements.

Ces modifications législatives n’ont pas sauvé le gouvernement libéral de la défaite électorale et il y avait lieu de s’attendre à ce que, tôt ou tard, bon nombre des changements apportés par le projet de loi 148 subissent le même sort sous le nouveau gouvernement progressiste conservateur.

Le 23 octobre 2018, le gouvernement de l’Ontario a déposé le projet de loi 47, intitulé Loi de 2018 pour un Ontario ouvert aux affaires, un retour de balancier majeur qui aurait pour effet de rétablir les normes antérieures au projet de loi 148. Le projet de loi 47, s’il est adopté, aura des répercussions sur plusieurs lois concernant les milieux de travail. En voici quelques points saillants.

Loi de 2000 sur les normes d’emploi

Salaire minimum

Le projet de loi 148 a fait passer le salaire minimum à 14,00 $ l’heure et prévoyait une augmentation supplémentaire à 15,00 $ l’heure le 1er janvier 2019. Bien que le projet de loi 47 ne diminuerait pas le salaire minimum actuel, l’augmentation de janvier 2019 serait éliminée. À compter de 2020, les augmentations du salaire minimum seraient liées à l’inflation.

Congé d’urgence personnelle

L’un des changements les plus importants introduits par le projet de loi 47 serait l’élimination des 10 jours de congé d’urgence personnelle (dont deux jours payés) prévus dans le projet de loi 148. Ce congé serait remplacé par un total de huit jours de congé sans solde par année – trois jours pour maladie personnelle, trois jours pour obligations familiales (comme la maladie ou des urgences concernant un conjoint ou un enfant) et deux jours pour congé de deuil. Les employeurs seraient de nouveau autorisés à exiger une note du médecin comme preuve raisonnable avant d’accorder un congé de maladie, ce qu’avait interdit le projet de loi 148. Autre changement important, aux termes du projet de loi 47, un employé qui prend un congé en vertu de son contrat de travail alors qu’il aurait aussi pu prendre un congé en vertu de la Loi de 2000 sur les normes d’emploi serait réputé avoir pris un congé en vertu de la Loi. Cette disposition vise à prévenir le double emploi en empêchant les employés de réclamer des congés prévus et par la loi et par leur contrat de travail pour une même absence.

À travail égal, salaire égal

Même si les dispositions relatives aux normes d’emploi prévoyant un salaire égal peu importe le sexe seront maintenues, le projet de loi 47 abrogerait l’application de ces normes aux employés se trouvant dans une situation d’emploi différente (comme les employés temporaires ou à temps partiel) et aux employés ponctuels. Cette disposition du projet de loi 148 s’est avérée un problème pratique pour de nombreux employeurs, notamment ceux sont les employés sont régis par des conventions collectives, et particulièrement lorsque les employés à temps plein touchent une rémunération plus élevée pour le même travail et que l’ancienneté n’est pas un facteur déterminant.

Détermination du statut d’employé

En ce qui concerne les différends quant à savoir si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, le projet de loi 47 abrogerait le « renversement du fardeau de la preuve » exigeant que l’employeur prouve qu’une personne n’est pas un employé. Cela ramènerait la loi au statu quo d’avant le projet de loi 148.

Horaires

En plus de modifier la règle des trois heures pour un salaire minimum lorsqu’un employé est tenu de se présenter au travail, le projet de loi 47 abrogerait les dispositions du projet de loi 148 qui devaient entrer en vigueur le 1er janvier 2019, notamment :

  • le droit de l’employé de demander des changements à son horaire ou à son lieu de travail;
  • les trois heures payées pour être de garde si l’employé est disponible, mais n’est pas appelé au travail;
  • le droit de refuser de travailler un jour où l’employé n’est pas tenu de travailler avec un préavis de moins de 96 heures;
  • les trois heures payées pour l’annulation d’un quart de travail prévu à l’horaire dans les 48 heures.

Contraventions

Les pénalités administratives maximales précédentes seraient rétablies.

Les modifications apportées par le projet de loi 148 à la Loi de 2000 sur les normes d’emploi ne seraient pas toutes abrogées par le projet de loi 47. L’augmentation du droit à un congé annuel payé de trois semaines après cinq ans de service sera maintenue. De plus, le gouvernement ne compte pas toucher aux dispositions donnant droit à un congé en cas de violence familiale et sexuelle.

Loi de 1995 sur les relations de travail

Listes d’employés

En vertu des modifications apportées par le projet de loi 148, un employeur pouvait être tenu de fournir à un syndicat une liste d’employés avec leurs numéros de téléphone et leurs courriels personnels, à condition que le syndicat puisse prouver que vingt pour cent des employés de l’unité de négociation proposée étaient membres du syndicat. Les dispositions relatives à la liste d’employés seraient abrogées par le projet de loi 47.

Accréditation syndicale par carte

Le projet de loi 47 abrogerait les modifications concernant l’accréditation des syndicats dans l’industrie des services de soins à domicile, des services de gestion d’immeubles et des agences de placement temporaire.

Accréditation corrective

Le projet de loi 148 permettait aux syndicats d’obtenir plus facilement une accréditation corrective sans vote des employés. Lorsqu’un employeur enfreignait la Loi de 1995 sur les relations de travail et, ce faisant, empêchait les employés d’exprimer leurs intentions réelles par un vote ou empêchait l’adhésion de 40 % des employés, la Commission des relations de travail de l’Ontario était tenue d’accréditer le syndicat. Le projet de loi 47 abrogerait cette disposition et autoriserait la Commission à ordonner la tenue d’un vote et à prendre des mesures pour que le vote représente la volonté réelle des employés, ce qui est plus conforme aux pouvoirs dont la Commission disposait avant le projet de loi 148.

Première convention collective

Le projet de loi 47 rétablirait les conditions antérieures au projet de loi 148 et imposerait l’arbitrage de la première convention collective (notamment dans le cas d’un refus de reconnaître un pouvoir de négociation ou un syndicat, de positions intransigeantes sans justification raisonnable ou de l’incapacité d’une partie à faire des efforts raisonnables pour conclure une convention).

Contraventions

Les amendes maximales antérieures au projet de loi 148 seraient rétablies. Elles passeraient de 5 000 $ à 2 000 $ pour les particuliers et de 100 000 $ à 25 000 $ pour les organisations.

Loi de 2009 sur l’Ordre des métiers de l’Ontario et l’apprentissage

Liquidation de L’Ordre des métiers de l’Ontario

Le gouvernement a l’intention d’élaborer un nouveau modèle pour la réglementation des métiers spécialisés et le système d’apprentissage d’ici le début de 2019. Dans le cadre de cette transition, le gouvernement liquiderait l’Ordre des métiers de l’Ontario. Même s’il semble que ces changements n’auraient pas d’incidence sur la Loi sur la santé et la sécurité au travail, les conséquences de la transition sur la reconnaissance professionnelle dans les métiers à accréditation obligatoire, où une formation et une qualification appropriées sont essentielles à la sécurité, soulèvent tout de même des questions.

Ratios compagnons-apprentis

Pour les métiers assujettis à des ratios, le projet de loi 47 établirait une norme d’un compagnon par apprenti en Ontario, ce qui éliminerait vraisemblablement certaines des limites actuelles au nombre d’apprentis qu’un employeur peut former.

Moratoire

Le projet de loi 47 imposerait un moratoire sur le renvoi de métiers au Registre du classement.

Bien que le projet de loi 47 ait seulement franchi l’étape de la première lecture, nous prévoyons que l’étude de ce projet de loi progressera rapidement. L’annexe décrivant les modifications apportées à la Loi de 2000 sur les normes d’emploi prévoit qu’elle entrera en vigueur le 1er janvier 2019 ou, s’il est ultérieur, le jour ou la Loi recevra la sanction royale. Nous continuerons de surveiller l’étude du projet de loi 47 à l’Assemblée législative.

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