La Loi sur l’équité salariale, que le gouvernement fédéral du Canada a adoptée en 2018, entre en vigueur le 31 août 2021. La Loi a pour objet l’atteinte de l’équité salariale par des moyens proactifs en corrigeant la discrimination systémique fondée sur le sexe que subissent les femmes dans le secteur fédéral. Elle exige que tous les employeurs analysent leurs pratiques de rémunération, même s’ils n’ont reçu aucune plainte et même s’ils sont convaincus qu’il n’existe aucun écart salarial dans leur organisation. La nouvelle Loi exige que les employeurs prennent des moyens proactifs afin de veiller à offrir une rémunération égale pour l’exécution d’un travail de valeur égale.
Exigences et délais de conformité
Les employeurs du secteur fédéral ayant un effectif d’au moins dix employés à la date d’entrée en vigueur de la Loi sont tenus d’élaborer un plan d’équité salariale pour leurs milieux de travail dans un délai de trois ans suivant l’entrée en vigueur de la Loi. La Loi exige que les employeurs affichent un avis faisant état de leurs obligations en vertu de la Loi dans les 60 jours suivant la date à laquelle ils deviennent assujettis à la Loi. Les employeurs doivent garder l’avis affiché jusqu’à ce qu’ils remettent aux employés la version définitive de leur plan d’équité salariale. Ils doivent en outre afficher une ébauche de ce plan pour une période de 60 jours. Au cours de cette période, les employés peuvent formuler des commentaires à leur employeur concernant le plan, et les employeurs doivent prendre en compte ces commentaires. Les employeurs doivent afficher la version définitive de leur plan au plus tard trois ans suivant la date à laquelle ils deviennent assujettis à la Loi.
Lorsque l’employeur a élaboré et affiché son plan d’équité salariale, il doit réaliser un examen et une mise à jour du plan au plus tard au cinquième anniversaire de la date à laquelle il a affiché ce plan ou la version définitive précédente du plan actualisé. Les mises à jour permettent de veiller à maintenir l’équité salariale et à corriger tout nouvel écart salarial, le cas échéant. À noter que dans le cas des employeurs ayant un effectif moyen inférieur à dix employés, l’ancien régime continue de s’appliquer et aucune autre mesure n’est requise de leur part.
Élaboration du plan d’équité salariale
Lorsqu’ils élaborent leur plan d’équité salariale, les employeurs sont tenus de prendre en compte les éléments suivants :
- Postes semblables
La Loi exige que les employeurs regroupent les postes qui comprennent des fonctions et des responsabilités semblables, et nécessitent des qualifications semblables, en une catégorie d’emploi. Pour ce faire, l’employeur devra peut-être réaliser un examen et une mise à jour des descriptions de poste existantes qui sont dépassées ou inexactes.
- Prédominance de genre
Les employeurs doivent ensuite déterminer la prédominance de genre de chaque catégorie d’emploi. On considère qu’un genre est prédominant dans une catégorie d’emploi lorsque :
- au moins 60 % des postes de la catégorie d’emploi sont occupés par un genre au moment de l’examen,
- au moins 60 % des postes de la catégorie d’emploi ont historiquement été occupés par un genre, ou
- la catégorie d’emploi est généralement associée à un genre en raison des stéréotypes professionnels fondés sur le genre.
- Rémunération associée à une catégorie d’emploi
Les employeurs doivent établir la valeur du travail et calculer la rémunération totale associée à chaque catégorie d’emploi dominée par un genre. (La Loi exige qu’elle soit établie sous forme de taux horaire pour fins de comparaison, même si les employés sont rémunérés par salaire, commission, etc.) Le critère que doivent appliquer les employeurs pour établir la valeur du travail est le dosage des qualifications, de l’effort et des responsabilités nécessaires pour accomplir le travail, compte tenu des conditions dans lesquelles il est accompli.
- Catégories d’emploi à prédominance masculine ou féminine
La Loi oblige les employeurs à comparer la rémunération associée aux catégories d’emploi à prédominance féminine à celles à prédominance masculine de valeur semblable afin de déterminer si une hausse de la rémunération s’impose pour des catégories d’emploi à prédominance féminine. Les employeurs doivent utiliser l’une des deux méthodes prévues par la Loi pour effectuer la comparaison de rémunération entre les catégories d’emploi à prédominance féminine et les catégories d’emploi à prédominance masculine.
- Déclaration annuelle
Lorsque l’employeur a élaboré la version définitive de son plan, il doit déposer auprès du « commissaire à l’équité salariale », une nouvelle fonction gouvernementale créée par la Loi sur l’équité salariale, une déclaration annuelle concernant l’état de son plan d’équité salariale. La déclaration doit comporter ce qui suit :
- le nom de l’employeur;
- la date à laquelle il est devenu assujetti à la Loi;
- si la version la plus récente du plan affichée a été établie ou mise à jour, selon le cas, avec ou sans comité d’équité salariale;
- le nombre d’employés qu’il comptait le dernier jour de l’année précédant celle au cours de laquelle la déclaration est déposée, et le nombre de catégories d’emploi à prédominance féminine, le cas échéant, nécessitant une augmentation de la rémunération conformément à la version la plus récente du plan d’équité salariale affichée. Il a aussi l’obligation de déclarer l’augmentation de la rémunération et le total des sommes forfaitaires versées;
- le nombre total d’employés occupant un poste compris dans chacune de ces catégories ayant droit aux augmentations et sommes forfaitaires et le nombre d’entre eux qui sont des femmes.
Comité d’équité salariale
La Loi exige que les employeurs ayant un effectif d’au moins 100 employés, ainsi que ceux ayant un effectif de plus de 10 employés, mais de moins de 99 employés, si certains ou l’ensemble de leurs employés sont syndiqués, forment un comité d’équité salariale chargé d’élaborer et de mettre en œuvre le plan d’équité salariale. Le comité d’équité salariale est composé d’au moins trois membres. Les règles ci-après s’appliquent à sa composition :
- au moins les deux tiers des membres représentent les employés visés par le plan;
- au moins cinquante pour cent des membres sont des femmes;
- au moins un membre, choisi par l’employeur, représente celui-ci;
- s’agissant d’employés syndiqués, il y a autant de membres représentant les employés syndiqués qu’il y a d’agents négociateurs.
Le comité est chargé d’élaborer un plan d’équité salariale et de déceler les écarts d’équité salariale entre les catégories d’emploi à prédominance masculine et ceux à prédominance féminine de valeur égale. De plus, le comité détermine les hausses de rémunération qui sont dues aux employés dans les catégories d’emploi où des écarts salariaux ont été décelés. Les employeurs devront verser rétroactivement des sommes forfaitaires pour les écarts d’équité salariale mis au jour et ils devront mettre en œuvre des rajustements de rémunération permanents, au besoin. Ces obligations prennent effet à compter de l’affichage du plan d’équité salariale actualisé.
Commissaire à l’équité salariale – mise en application de la loi
La nouvelle Loi prévoit la nomination par le gouvernement fédéral d’un commissaire à l’équité salariale chargé de veiller au respect des obligations imposées par la Loi. Le commissaire peut ordonner à un employeur de réaliser des audits internes ou de préparer des rapports sur les résultats de son plan d’équité salariale. De plus le commissaire est habilité à imposer des pénalités de 30 000 $ à 50 000 $ en cas de violation de la Loi ou d’une ordonnance du commissaire. La Loi établit également un mécanisme de règlement des différends relevant du commissaire, s’il survient un différend en matière d’équité salariale entre l’employeur et ses employés (ou le syndicat) au cours de l’élaboration du plan d’équité salariale ou par la suite.
Principaux éléments à retenir pour les employeurs
La nouvelle Loi impose de nouvelles obligations strictes aux employeurs du secteur fédéral qui peuvent exiger une bonne dose de planification et d’efforts en vue de corriger de manière proactive les écarts d’équité salariale dans leur milieu de travail. La Loi prévoit également de lourdes pénalités pour ceux qui n’adopteront pas de mesures de conformité proactives. Les employeurs auraient intérêt à agir en vue de s’acquitter de leurs nouvelles obligations d’équité salariale afin d’avoir tout le temps nécessaire pour devenir conformes aux nouvelles exigences en matière d’affichage et d’élaboration de plan au cours de la période d’adaptation de trois ans.
Le groupe de pratique de l’équité salariale d’Ogletree Deakins continuera de surveiller l’évolution de la situation en ce qui concerne la Loi sur l’équité salariale. Les employeurs peuvent également suivre les webinaires et les balados du cabinet, où ils trouveront des renseignements essentiels.
Ryan Martin est sociétaire au bureau de Montréal d’Ogletree Deakins.
Shir Fulga est sociétaire au bureau de Toronto d’Ogletree Deakins.
Ryan T. Smith est étudiant en droit et participe actuellement au programme d’été du bureau de Montréal d’Ogletree Deakins.