Les employeurs qui embauchent des employés d’âge mineur doivent respecter une multitude de règles avant tout destinées à protéger ces derniers contre, entre autres, les conditions de travail dangereuses, l’exploitation et les traitements abusifs.

Les législateurs et les tribunaux ne ménagent aucun effort pour protéger les travailleurs d’âge mineur, particulièrement à la lumière des affaires d’exploitation financière et autres abus qui ont fait et font encore les manchettes. Les employeurs de l’industrie du spectacle doivent non seulement se conformer aux règles d’application générale qui régissent l’embauche de mineurs, mais également aux règles propres à leur industrie.

Protections générales applicables aux travailleurs mineurs au Canada

Chaque province canadienne a adopté des dispositions législatives qui prescrivent l’âge minimum pour travailler dans différents secteurs ainsi qu’un ensemble de conditions pouvant s’appliquer à certains types de travail ou au travail dans des secteurs donnés. Cet article prend l’Ontario et la Colombie‑Britannique en exemples.

La majorité des provinces ont fixé un âge minimum général pour travailler dans le secteur industriel (défini au sens large). Cet âge est de 14 ans en Ontario et de 15 ans en Colombie‑Britannique. Dans d’autres provinces, l’âge minimum général pour occuper un emploi varie entre 14 et 17 ans.

Dans certains secteurs, il faut être plus vieux pour pouvoir travailler. C’est le cas des secteurs suivants en Ontario, pour lesquels les normes d’emploi et la réglementation en matière de santé et sécurité au travail en Ontario fixent l’âge minimum pour travailler à :

  1. 15 ans dans les usines ou ateliers de réparations
  2. 16 ans dans les activités d’exploitation forestière
  3. 16 ans dans la construction
  4. 16 ans dans les activités minières en surface
  5. 18 ans dans les activités minières souterraines

En Colombie‑Britannique, l’âge minimum général pour travailler est de 15 ans, quoique les enfants âgés de 12 à 14 ans peuvent travailler sur présentation d’une autorisation écrite de leurs parents ou de leur tuteur. Cette exigence donne l’occasion au parent ou au tuteur de s’assurer que l’emploi est convenable et dans l’intérêt supérieur de l’enfant et qu’il ne nuira pas à ses besoins sociaux, physiques et éducatifs. Pour embaucher un enfant de moins de 12 ans, un employeur doit obtenir un permis du directeur des normes d’emploi.

En Colombie‑Britannique et en Ontario (et dans la plupart des autres provinces), les règles restreignent ou encadrent l’emploi pendant les heures d’école régulières ou les jours d’école (à moins que le travailleur d’âge mineur ait été légalement dispensé de fréquentation scolaire). Ainsi, la Colombie‑Britannique fixe les limites suivantes pour le nombre d’heures de travail des enfants âgés de 12 à 14 ans :

  • 4 heures les jours d’école;
  • 7 heures les jours où il n’y a pas d’école, sauf autorisation écrite du directeur des normes d’emploi;
  • 20 heures dans une semaine où il y a 5 jours d’école;
  • 35 heures dans toute autre semaine.

Chaque province et son ministère du Travail ont particulièrement à cœur la protection des jeunes travailleurs en ce qui concerne différents aspects du travail, comme les normes d’emploi et la santé et la sécurité au travail. Il ne faut cependant pas oublier la myriade d’autres règles qui s’appliquent aux jeunes travailleurs, notamment à ceux qui ont dépassé l’âge minimum requis pour exercer un emploi dans le secteur industriel.

L’embauche de mineurs dans l’industrie du spectacle

Les employeurs de l’industrie du spectacle vivant ou enregistré doivent s’assurer de respecter les règles qui s’appliquent tout particulièrement aux mineurs travaillant dans leur industrie. En Colombie‑Britannique comme en Ontario, des lois ont été adoptées précisément pour encadrer le travail des mineurs dans le domaine du divertissement.

En Colombie‑Britannique, les jeunes de moins de 15 ans qui travaillent dans l’industrie du spectacle enregistré (productions cinématographiques, télévisuelles ou vidéo) sont régis par un ensemble de règles tout à fait distinct de celui qui s’applique aux autres jeunes travailleurs. Ces règles sont énoncées aux articles 45.5 à 45.13 du règlement sur les normes d’emploi (Employment Standards Regulation). Ces règles prévoient notamment ce qui suit :

  1. L’âge minimum pour travailler est 15 jours.
  2. Les enfants de moins de 12 ans ne peuvent travailler plus de 8 heures après leur arrivée sur le lieu de travail. Pour les enfants âgés de 12 à 14 ans, un quart de travail ne peut dépasser 10 heures.
  3. Des règles spéciales s’appliquent au travail pendant les jours d’école, et les heures auxquelles le travail peut commencer et doit prendre fin peuvent varier, tout dépendant si le lendemain est un jour de classe ou si la période scolaire est en cours.
  4. Les quarts fractionnés sont interdits, tout comme les longues pauses‑repas (puisqu’elles pourraient donner lieu à des quarts fractionnés).
  5. Le temps passé devant un appareil d’enregistrement est rigoureusement réglementé, et une pause, précisée au règlement, doit être accordée entre les séances d’enregistrement. La durée des séances d’enregistrement et des pauses varie selon l’âge de l’enfant.
  6. L’enfant a droit à au moins 48 heures consécutives d’inactivité par semaine (faute de quoi il doit être rémunéré à un taux correspondant à une fois et demie son taux salarial habituel pour chaque heure d’inactivité qu’il aurait dû avoir); à 12 heures d’inactivité entre chaque quart de travail et à 12 heures d’inactivité entre la fin de son quart de travail et l’heure à laquelle il doit se présenter à l’école.
  7. L’enfant ne peut travailler plus de 5 jours dans une semaine (ou 6 jours avec l’autorisation écrite du directeur des normes d’emploi).
  8. L’enfant doit être accompagné d’un parent ou d’un tuteur, ou d’une personne âgée de plus de 19 ans ayant été désignée par le parent ou le tuteur de l’enfant.
  9. Si un enfant gagne plus de 2 000 $ pour son travail dans une production, l’employeur doit verser 25 % de ces revenus au tuteur et curateur public, qui les mettra en fiducie pour le compte de l’enfant.

Un ensemble différent de règles s’applique aux enfants âgés de 4 à 15 ans qui travaillent dans l’industrie du spectacle vivant (on entend par là les productions de théâtre, de danse, de musique, d’opéra ou de cirque). Ces règles prévoient notamment ce qui suit :

  1. L’enfant ne peut travailler plus de 8 heures dans une journée (ou jusqu’à 12 heures dans une journée s’il ne donne pas de représentation ce jour‑là, une exception qui ne peut survenir plus de quatre fois par production).
  2. L’enfant ne peut commencer à travailler avant 7 h ou finir de travailler après 0 h 30.
  3. L’enfant a droit à au moins 36 heures d’inactivité par semaine (faute de quoi il doit être rémunéré à un taux correspondant à une fois et demie son taux salarial habituel pour chaque heure d’inactivité qu’il aurait dû avoir) et à 12 heures d’inactivité entre chaque quart de travail.
  4. L’enfant doit être accompagné d’un parent ou d’un tuteur, ou d’une personne âgée de plus de 19 ans ayant été désignée par le parent ou le tuteur de l’enfant.
  5. Si un enfant gagne plus de 1 000 $ dans une semaine, l’employeur doit verser 25 % de ces revenus au tuteur et curateur public, qui les mettra en fiducie pour le compte de l’enfant.

En février 2016, une nouvelle loi est entrée en vigueur en Ontario, la Loi de 2015 sur la protection des enfants artistes. À l’instar de son équivalent en Colombie‑Britannique, cette loi prévoit des règles qui s’appliquent plus particulièrement aux enfants âgés de moins de 18 ans qui travaillent dans l’industrie du spectacle vivant et enregistré.

La Loi de 2015 sur la protection des enfants artistes énonce plusieurs règles d’application générale, dont les suivantes :

  1. Avant d’employer un enfant artiste ou de l’engager à contrat, l’employeur tient une réunion durant laquelle il divulgue au père, à la mère ou au tuteur légal de l’enfant une description générale du rôle que jouera l’enfant; le lieu et les heures des répétitions et des représentations; tout danger pour la santé ou la sécurité auquel l’enfant risque d’être exposé et les précautions qui seront prises pour éviter qu’il ne soit blessé; toute habileté particulière à laquelle on s’attend de l’enfant; et les effets spéciaux auxquels l’enfant pourrait être exposé. Par ailleurs, tout changement subséquent à ces renseignements doit lui être divulgué.
  2. Un employeur et un enfant artiste doivent avoir un accord écrit.
  3. Un parent, un tuteur ou une personne autorisée (âgée de plus de 18 ans) doit accompagner l’enfant artiste de moins de 16 ans lorsqu’il se rend au lieu de travail et en revient.
  4. Un parent ou un tuteur doit accompagner l’enfant artiste lorsqu’il doit passer la nuit à l’extérieur de chez lui, et les frais sont pris en charge par l’employeur.
  5. L’employeur doit réserver du temps dans l’horaire de travail des enfants artistes en âge de scolarité obligatoire pour qu’ils bénéficient d’un tutorat.
  6. Si un enfant artiste gagne plus de 2 000 $ dans le cadre d’une production ou d’un projet, son employeur remet 25 % de ces gains à une personne prescrite par règlement et l’argent est détenu en fiducie pour le compte de l’enfant, à moins que l’enfant soit membre d’un syndicat ou d’une association professionnelle qui négocie pour son compte et que la convention collective prévoie le versement des gains dans une fiducie.
  7. Une formation spéciale en santé et sécurité doit être offerte à tous les enfants artistes et aux personnes qui les accompagnent.
  8. Des aliments sains doivent être fournis à tous les enfants artistes.

Des règles supplémentaires s’appliquent aux enfants de l’industrie du spectacle enregistré, notamment les suivantes :

  1. L’âge minimum d’emploi est 15 jours.
  2. Les enfants artistes de moins de deux ans ne peuvent travailler plus de quatre heures dans une journée, tandis que ceux âgés de plus de deux ans peuvent travailler huit heures par jour.
  3. Un préavis de 48 heures doit être donné à l’enfant artiste qui doit se présenter au travail après 19 h.
  4. L’enfant artiste a droit à au moins 12 heures consécutives d’inactivité par jour et à 48 heures consécutives d’inactivité par semaine.
  5. Les quarts fractionnés sont interdits, tout comme les longues pauses‑repas (puisqu’elles pourraient donner lieu à des quarts fractionnés).
  6. Le temps passé devant un appareil d’enregistrement est rigoureusement réglementé, et une pause, précisée au règlement, doit être accordée entre les séances d’enregistrement. La durée des séances d’enregistrement et des pauses varie selon l’âge de l’enfant.
  7. L’enfant doit être accompagné sur le lieu de travail par un parent ou un tuteur, ou une personne âgée de plus de 18 ans ayant été désignée par le parent ou le tuteur de l’enfant.
  8. L’employeur doit désigner une personne sur chaque lieu de travail en qualité de coordonnateur des enfants artistes qui sera chargé des questions liées au bien-être, à la sécurité et au confort des enfants artistes.

Des règles supplémentaires s’appliquent aux enfants de l’industrie du spectacle vivant, dont les suivantes :

  1. L’âge minimum d’emploi est deux ans et demi.
  2. En période de répétition, les enfants de moins de six ans ne peuvent travailler plus de quatre heures par jour ou 16 heures par semaine, tandis que les enfants âgés de plus de six ans ne peuvent travailler plus de huit heures par jour ou 42 heures par semaine.
  3. En période de représentation, un enfant artiste ne peut travailler plus de huit heures dans une journée lorsqu’il travaille deux jours par semaine, et plus de quatre heures les autres jours. Le nombre maximal d’heures de travail dans une semaine est de 32.
  4. Tous les enfants artistes doivent se voir accorder au moins 12 heures consécutives d’inactivité dans une journée et 36 heures consécutives d’inactivité dans une semaine.
  5. Les enfants artistes ne peuvent travailler plus de deux heures consécutives sans pause d’au moins 10 minutes.
  6. Un parent, un tuteur ou une personne désignée (âgée de plus de 18 ans) doit accompagner l’enfant artiste sur le lieu de travail, et une personne doit être désignée pour surveiller les enfants artistes lorsqu’ils ne sont pas en répétition ou en représentation. 

Conclure un contrat avec un mineur

Toutes les provinces canadiennes ont fixé un âge minimum pour l’atteinte de la majorité (18 ans en Ontario; 19 ans en Colombie-Britannique, et 18 ou 19 ans dans les autres provinces). Il faut savoir que le fait de signer un contrat avec une personne n’ayant pas atteint l’âge de la majorité n’est pas sans risque.

Une règle en common law veut qu’un contrat conclu par un mineur puisse être déclaré nul si tel est le souhait de l’enfant, à moins qu’il s’agisse d’un contrat visant à lui procurer les nécessités de la vie (comme la nourriture, l’hébergement, des services juridiques ou médicaux), d’un contrat de louage de services profitable au mineur (pour un emploi, une formation ou une formation en apprentissage, par exemple), ou d’un accord que le mineur signe après avoir atteint l’âge adulte.

Sans grande surprise peut‑être, l’un des cas d’espèce sur les circonstances dans lesquelles un mineur peut faire annuler un contrat d’emploi au Canada concerne un joueur de hockey mineur qui est plus tard devenu joueur de hockey professionnel.

La décision Toronto Marlboro Major Junior “A” Hockey Club, et al. v. Tonelli, et al. porte sur la poursuite intentée par le club de hockey des Marlboros de Toronto (qui était le club-école des Maple Leafs de Toronto) contre John Tonelli, un de leurs joueurs qui, après son 18e anniversaire, a pris la décision de faire annuler son contrat avec le club qui lui permettait de jouer dans la ligue junior en vue d’intégrer les rangs d’une équipe de hockey professionnelle. Selon les modalités de ce contrat type, John Tonelli était tenu de verser aux Marlboros de Toronto 20 % de ses revenus bruts gagnés au sein d’un club de hockey professionnel pendant les trois premières années de son contrat, vraisemblablement pour compenser les coûts de sa formation et de son développement en tant que joueur de hockey.

Il s’agissait dans cette affaire de déterminer si le contrat de service était, dans son ensemble, profitable à John Tonelli au moment de la signature. Si ce n’était pas le cas, ce contrat ne l’engageait pas légalement et la décision de le faire annuler après son 18e anniversaire était valide. Le juge de première instance avait alors précisé que le terme « profitable » faisait essentiellement référence à un gain financier. Le fardeau de démontrer que le contrat était profitable incombait à l’employeur.

Après un examen attentif des modalités du contrat, le juge de première instance est arrivé à la conclusion que le contrat ne profitait pas également aux deux parties et même qu’il favorisait – et de loin – les intérêts des Marlboros, notamment parce qu’il autorisait les Marlboros à résilier le contrat qui les liait à John Tonelli à leur discrétion, tandis qu’il liait légalement ce dernier pendant plusieurs années. Le contrat conférait également les droits télévisuels et médiatiques exclusivement aux Marlboros, et la valeur des « services » de formation et de développement offerts à John Tonelli n’était nullement comparable à la somme d’argent que ce dernier aurait été tenu de verser aux Marlboros aux termes du contrat. En appel, la Cour d’appel de l’Ontario à la majorité s’est rangée à l’avis du juge de première instance et a conclu que John Tonelli pouvait faire annuler le contrat.

Les affaires d’annulation de contrat de ce genre sont certes rares, mais le message envoyé aux employeurs est néanmoins sans équivoque : les contrats conclus avec les jeunes dans l’industrie du spectacle sont très délicats, surtout s’ils contiennent de lourdes restrictions ou des modalités pouvant sembler avantager une seule partie. Les tribunaux examineront minutieusement de tels contrats, et si le jeune le fait annuler, il incombera à l’employeur de démontrer que le contrat était profitable au jeune au moment où il l’a signé.


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